C'est l'histoire d'un pays qui survit par ceux qui en sont partis

Depuis quatre ans, le Liban est à genoux et survit sous perfusion de sa diaspora. Il y a plus de Libanais à l'extérieur du pays que sur la terre des Cèdres. Partout, cette population d'exilés tente de garder le pays hors de l’eau, en y envoyant des milliards chaque année.

Sur le port de Beyrouth, la statue de l’Emigré a miraculeusement survécu à l’explosion de 2020. | Keystone / AP Photo / Hussein Malla
Sur le port de Beyrouth, la statue de l’Emigré a miraculeusement survécu à l’explosion de 2020. | Keystone / AP Photo / Hussein Malla

Coincée entre une supérette et un restaurant japonais, la chapelle Saint-Louis semble faire corps avec la grisaille ambiante de cette fin novembre 2023 à Alfortville, près de Paris. Mais une fois à l’intérieur, on est comme transporté vers des temps reculés sur des terres lointaines, guidé par les mélopées d’un ney, cette flûte en bambou traditionnelle du Moyen-Orient. Devant l’autel, le père Roger Baaklini entame un chant en araméen, la langue de Jésus. En ce dimanche matin, l’église est pleine à craquer. Les fidèles, libanais ou franco-libanais, sont emmitouflés et se serrent sur les bancs.

Des fidèles arrivent à la chapelle Saint-Louis d’Alfortville pour la messe dominicale. | Weilian Zhu

Chez les maronites de Suresnes

Depuis 2014, la petite église de banlieue parisienne est vouée au culte maronite, cette communauté chrétienne du Liban très présente en France – on en dénombre plus de 80’000. L’Hexagone entretient des liens culturels forts avec ces catholiques du Moyen-Orient, volontiers francophiles et francophones, avant même la période coloniale. «Il y a de plus en plus de gens qui viennent», confie le père Baaklini, qui officie ici depuis 2018. «Avec les crises, la messe est devenue pour la communauté libanaise un moment de communion, de consolation et de solidarité.»

Qu’ils soient en France de longue date ou fraîchement arrivés, tous ou presque ont gardé un lien fort avec le pays du Cèdre. Chacun a des parents, des cousins, des tantes restés là-bas. Alors face aux difficultés de la communauté, on se mobilise volontiers.

La messe dominicale à la chapelle Saint-Louis d’Alfortville fait salle comble. Certains passages se tiennent en araméen. | Weilian Zhu

C’est le cas de Micha Bremeau Samara, arrivée en France en 1999. «Tous les dimanches, c’est le plaisir de partager la messe, de transmettre aux enfants comment on vit en communauté. On vient aussi parler des personnes qui sont malades, de nos chagrins.» Cette pétulante gestionnaire immobilière, originaire de la ville balnéaire de Jounieh, au nord de Beyrouth, se définit comme de la «génération guerre civile». Ayant prospéré dans les affaires, elle prévoyait de prendre une retraite dorée au soleil. «Je voulais arrêter de travailler et aller vivre sur la Côte d’Azur, mais avec la crise j’ai dû continuer.» Aujourd'hui, elle subvient aux besoins de 23 personnes au Liban, leur envoie de l’argent et des médicaments.

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